Le tabac, modèle de l’épigénétique dans les addictions

Le tabac a des effets psychiques modestes, des inconvénients majeurs. Pour la plupart des fumeurs il est difficile de cesser de fumer. Ces contradictions ont des explications. Le tabac possède plusieurs facettes addictives. Ces facettes sont réunies par un élément chimique aux effets subtils et puissants : LA NICOTINE !

Trois facettes de l’addiction au tabac :


1- La nicotine prend la place de l’acétylcholine,

Avant de rencontrer le tabac, le corps ne connait pas la nicotine. La nicotine est d’abord toxique. La tolérance, puis l’accoutumance à la nicotine est rapide. Pour l’organisme, la nicotine apparait plus efficace et plus économique que l’acétylcholine. La dépendance se met en place, la nicotine remplace l’acétylcholine. L’addiction est en place. Le manque de nicotine devient un manque d’acétylcholine. Ce manque est vécu comme un panne vitale. Pour ne jamais faire cette expérience, les fonctions biologiques organisent efficacement la recherche et la consommation du tabac. La dépendance est forte, connaitre son mécanisme permet de la démonter en douceur.

2- L’acétylcholine, neuromédiateur essentiel,

L’acétylcholine est un messager chimique. Le neuromédiateur qui assure la transmission des informations entre les neurones, entre les capteurs et les récepteurs. Le corps perçoit et agit, un grand nombre d’informations circulent, l’acétylcholine est présente à toutes les étapes.
L’acétylcholine concerne les activités « conscientes » se lever pour boire un verre d’eau, et les activités « non-conscientes », les mouvements du souffle, du cœur ou du système digestif. L’acétylcholine intervient dans les perceptions du corps et du monde, du plaisir ou du déplaisir. L’acétylcholine gère les mémoires et les idées. L’acétylcholine agit dans des milliers d’informations et d’actions vitales à chaque instant.

3- L’épigénétique dans l’addiction à la nicotine,

Les récepteurs de l’acétylcholine au contact avec la nicotine deviennent récepteurs nicotiniques (de l’acétylcholine). Cette adaptation est épigénétique. Les gènes modifient leur expression. Cette adaptation est rapide. Quelques cigarettes suffisent, l’inverse est lent, une dizaine d’années est nécessaire, et suffisante, pour que la dépendance s’efface.

L’addiction à la nicotine


Réversible !

Arrêter de fumer, revient à inverser le cours d’une mécanique biologique profonde. La nicotine est d’abord un poison. Un poison masqué ! Sa ressemblance avec l’acétylcholine retourne la biologie. La nicotine devient indispensable. Le tabac et la fumée du tabac apparaissent comme bon et nécessaire. La production d’acétylcholine se met en grève. L’addiction est là. Cette organisation est réversible.

La « volonté » est soumise aux besoins vitaux. Le fumeur est maintenant informé des dangers du tabac. Le fumeur fume pour échapper aux perceptions du sevrage. Le sevrage est perçu comme une énorme montagne. Le « plaisir » souvent nommé comme « récompense » est dans les solutions apparemment simples de consommer. La solution pour ne gravir ou passer à travers la montagne se trouve dans un peu de tabac. Cet exemple de montagne est très relatif, dans les expériences vécues, de nombreux fumeurs préfèrent escalader la montagne que d’affronter le sevrage.

La nicotine est le vecteur majeur de l’addiction au tabac. La nicotine, sans tabac ni fumée, est un excellent intermédiaire vers le sevrage. La nicotine aujourd’hui, est disponible sous de nombreuses formes. La nicotine se trouve en pharmacie (prise en charge par l’Assurance Maladie avec une ordonnance). La nicotine se trouve dans les systèmes de vaporisations (la e-fumée est cent-mille fois moins dangereuse que la fumée, pas de combustion, pas de goudrons).

La dépendance biologique s’accroche à des dépendances culturelles. L’addiction au tabac est plurifactorielle. Chimique, le monoxyde de carbone (CO) a des effets sur les humeurs. Les saveurs du tabac et celles ajoutées, agissent comme des phéromones (hormones volatiles). Mythique, le tabac appartient aux plantes magiques. Rituel du feu, du coffret, des gestes. Progressiste, le fumeur de tabac prolonge l’aventure et les explorations de Cristobal Colomb.

Résistances,

La dépendance à la nicotine concerne la biologie profonde, celle qui fait percevoir, penser et agir. Il s’agit de l’organisation biologique qui exprime la faim ou la soif et qui anticipe les recherches de nourriture. La part biologique est enrobée de cultures, de rites et de conditionnements.

L’addiction à la nicotine est aussi addicte à la forme sous laquelle la nicotine est absorbée. Le passage à une autre forme, autre goût, autre modalité rencontre des résistances et des réactions. Le tabac, c’est la rencontre entre la biologie et les psychés. Les réactions sont du même rang, psychosomatiques.

Comme le béton est fait de sable, la sortie de la dépendance au tabac vise le retour vers le sable, vers le malléable !