Dialogues autour de l’addiction
Définitions, étymologie
Que nous disent les addictions ?
Que ne disent pas les addicts ?
Est-ce que les addictions sur-disent ?
Les addictions parlent et font du bruit.
Addiction, du latin ad-dicere (dire)
Les mots sont soumis à la principale loi de la nature, le mouvement !
Nous approchons le mot addiction dans l’esprit du soin. Actuellement, dans le soin, le mot addiction est envisagé dans le sens du moyen-âge « contrainte par corps d'un débiteur défaillant ».
Contrainte, une forme d’esclavage, à l’opposé, se trouve soigner, cheminer vers la liberté.
Ici, liberté et santé se rapprochent et peut-être se confondent.
Définition donnée par l’Académie Française
(9ème édition, ‘’actuelle’’ le 31/05/23) :
« État de dépendance à l’égard d’une drogue, d’un produit nocif et, par extension, d’une activité dont la pratique à l’excès est nuisible. »
Définition figée dans les glaciers, loin dans les montagnes. Figés, la dépendance, le nocif et le nuisible. Figées, la morale et l’éthique du vingtième siècle. La première moitié du vingtième a été d’une grande violence en Europe. Violences sources de traumas et de compensations. Compensations des vides, de pensées et de situations addictives. Violences des réponses des prohibitions.
Les addictions ont des histoires, autant d’histoires intimes que d’histoires sociales. Le soin est un mouvement dans l’histoire intime et sociale, à chacun de participer.
Dictionnaire historique de la langue française
Le « Dictionnaire historique de la langue française, dirigé par Alain Rey » invite à la dynamique des mots. Le mot contient un sens intime, un sens social, un sens dynamique.
Pour le mot addiction, plusieurs voies, plusieurs époques, addictus « abandonné » qui a donné au XVIe l'anglais addict, adjectif. Au moyen-âge « contrainte par le corps pour le règlement d’une dette ». En latin, l’origine du mot addiction est « ad-dicere », « dire avec une valeur solennelle, religieuse et juridique ».
Ad-dicere, Dire, sur-dire, ne pas dire, dire davantage… ce sens parait une grande évidence.
Que nous disent les addictions ?
Que ne disent pas les addicts ?
Est-ce que les addictions sur-disent ?
Les addictions parlent et font du bruit.
Des bruits de fond des cavernes, des bruits d’autres planètes, les bruits de l’histoire.
A l’opposé, la liberté, les libertés
Dire les traumas
Liberté entre le fini, l’indéfini est l’infini
La liberté est une notion subjective et personnelle, sensible et évolutive. L’addiction défend la liberté de l’addiction, des produits et des comportements vécus comme une liberté. Ces libertés finies (limitées), par les limites des produits et des comportement. Les addictions installent des bornes. La liberté indéfinie, selon les limites du moment, du lieu et des moyens. La liberté finie là où commence celle de l’autre.
Notre culture (gréco-romaine) occidentale est en grande partie assujettie à un modèle dominant, le père, le maître, le patron, l’élu, la force supérieure. Le modèle connait et tient la raison, les raisons, les pouvoirs. Le modèle dupliqué dans chaque famille est tyrannique. Honneur pour ceux obéissent et reproduisent, déshonneur (honte) pour ceux qui échouent.
Les addictions se trouvent très souvent dans ce traumatisme, la honte comme pédagogie. Le modèle parental, chemin de la force et de la liberté, projette ses propres échecs et ses propres traumas.
L’épigénétique, prolongement de la génétique, transmet biologiquement les conditionnements et les traumas.
La conscience de la place réelle de la liberté est l’objectif du soin.
La santé (=liberté) est le réel objet de la consultation.
Les produits
Les produits font apparaitre ce qui existe. La liberté infinie, sans limite, originelle.
Les produits transportent, amplifient, multiplient, colorent.
Les produits bousculent et parfois déséquilibrent.
Il y a « bon usage » et « mésusage ».
Il y a capacité à gérer ou à se trouver débordé.
Les produits, par eux-mêmes ne sont pas problématiques !
Leurs effets potentiels, dans des contextes et sur des terrains particuliers peuvent être problématiques.
Les produits et les comportements ne peuvent rien apporter qui n’existe déjà.
La liberté est innée, dans la nature de la nature.
Le terrain
Le terrain est fait de biologie et d’histoire,
La biologie est faite de la génétique, de programmes et d’éléments extérieurs, la nourriture, le climat, l’espace, les pressions et les dépressions.
La génétique est marquée par les événements, c’est une part de l’épigénétique.
Les programmes hérités transportent un terrain, des capacités à s’adapter et des fragilités.
Le terrain, ce sont des liens biologiques productifs, généreux, aimant ou parcimonieux, offerts ou retenus.
Le terrain demande de l’attention, de l’entretien et souvent quelques nettoyages.
Sortir de l’addiction, un choix possible
L’addiction est un barrage. Des libertés enfermées.
Avant l’addiction, il y a une histoire, des contextes et des pressions. Très souvent des traumas, très souvent des violences. S’il y a plaisir dans l’addiction, il y a déplaisir ailleurs.
Liberté, enfermement, plaisirs et déplaisirs, bonheurs et malheurs… forment une sorte de balançoire. Soigner, c’est interrompre ce balancement. Le balancement a été identifié à la vie. Le soin est une séparation.
Avec et après l’addiction, il y a des conséquences physiques, sociales et psychiques, des dommages pour la liberté et pour la santé.
Il y a le dire sur le produit, sur les produits. Le fait accompli.
Il y a surtout ce qui précède le produit, ce qui amène vers le produit, ce qui pousse, ce qui lève vers le produit.
Aucun traitement, ni baguette magique ne fera disparaitre les produits !
Le dialogue porte sur les pulsions, regarder l’attraction, les aspirations, les moments creux et glissants…
Les dialogues portent sur la balançoire des moments, des hauts et bas. Depuis quand ces perceptions ? Les premières rencontres avec les produits, certes, et surtout avec les émotions qui précèdent. Explorer les strates.
Le dialogue est vaste, sur les situations corporelles, les situations psychiques, les comportements, les situations sociales, les degrés de liberté.
Le soin est un cheminement, les deux acteurs cheminent, le soignant autant que le soigné.
Dictionnaire historique de la langue française, dirigé par Alain Rey
ADDICTION n. f. est un emprunt (1979) à l'anglais. Le nom dérive du verbe to addict, lui-même pris au bas latin addictus « abandonné » qui avait donné au XVIe l'anglais addict, adjectif. Le dérivé addictio existe en droit médiéval, pour « contrainte par corps d'un débiteur défaillant ». En latin ad- et dicere (> dire) a une valeur solennelle, religieuse et juridique. Sa valeur première est « livrer, fournir », ce qui explique son emploi en finances, dans le vocabulaire du prêt.
ADDICTION en anglais, désigne la situation de dépendance à une substance, à une pratique, et le comportement compulsif qu'elle entraîne.
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